Les épaisses pluies de la nuit et du matin n’avaient pas douché l’enthousiasme du public pescalune qui pour la première fois de l’histoire remplissait l’enceinte Francis San Juan “hasta la bandera” pour un “no hay billetes” acquis depuis plusieurs jours et donc, historique. Ciel dégagé, température des plus agréable, air léger éloignant la cagne des derniers jours, un auditoire enclin aux envolées et qui est reparti visiblement satisfait du spectacle.

Compréhensible puisque ce fut globalement une tarde dite « entretenue » avec plusieurs très bons moments et qui s’est soldée par une sortie en triomphe conjointe d’Alejandro Talavante et Daniel Luque chacun emportant des ses bagages une moisson de trois oreilles.

Deux toros de la famille Gallon, bas et cornicortos pour le rejon. Le premier mobile, juste de forces et allant a menos, le second plus rapidement aplomado et qui rendit la tâche compliquée à la nîmoise. Cinq toros de Victoriano del Rio et un de Toros de Cortes (3eme, même maison), de corrects à justes de trapio et d’encornure, le 2 petit et cornicorto, plus charpentés les 3 et 4, tous agréables de tête et offrant du jeu à divers degrés d’expression, de mobilité et de brio. Tous monopiqués en des tercios de piques à discrétion, d’un impact un poil plus prononcé chez les 3 et 8.

En ouverture du bal, la gardoise Léa Vicens venue en habitué des Arènes San Juan, est tombée sur un Gallon mobile mais qui baissa pavillon dans la deuxième partie d’une faena construire sur une monte classique et comprenant quelques bons passages du Betico avec les banderilles. Rejon de muerte trasero et descabello.

Son second, éteint en deux temps trois mouvements et limité par son jeu, priva la nîmoise de quelques poursuites qui auraient relevées la note d’une faena sans écho ni brio, conclue d’une lame passée.

Sebastien Castella hérita en premier lieu d’un animal, bas, court et peu armé, salué par un bouquet de véroniques de bonne note avant puyazito pour la forme. Brindis au public avant entame en tablas par le haut et conclue de savoureux remates par le bas. Face à un toro noble mais juste de son, le biterrois édita une faena limpide comprenant plusieurs mouvements droitiers d’un meilleur effet, ceux avec le plus de profondeur. Ce fut moins fluide à gauche et l’ensemble alla quelque peu à menos. Pinchazo, entière contraire en arrière. Oreille.

Le maestro de Béziers dédia ensuite son combat à Hadrien Poujol cheville ouvrière de Maestria Production. Faena initiée par doblones bien sentis face à un toro bravito et d’abord bien embarqué de la droite avant qu’homme et toro ne parvienne à réellement s’entendre sur la zurda. Faena technique, un poil trop rallongée, qui manqua de son et de vibrations et alla naturellement à menos. Lame entière.

Alejandro Talavante semble avoir fait de Lunel l’une de ses arènes de prédilection. Après son grand triomphe de l’année dernière, le maestro de Badajoz est apparu particulièrement décidé à réitérer. Bonnes véroniques de reception pour animal qui poussa, un peu, sous le fer et qui démontra un certain fond de bravoure dès les premiers échanges muleteros. Flanelle en main, Talavante démontra pureté et dominio sur la diestra, avec une facilité déconcertante avant d’égrainer plusieurs naturelles profondes face à un toro allant à menos et plus incommode dans ses embestidas. Bernardinas, espadazo et débâcle du puntillero. Oreille bien fêtée.

Mais c’est face à l’excellent quinto que l’extremeño allait donner sa pleine mesure. D’abord sur une réception par trois faroles puis douces véroniques. Préservé sous le fer de Miguel Angel Muñoz, « Armero », après un bon quite par gaoneras, s’engouffra à pleins poumons dans l’étoffe d’un Talavante qui n’en demandait pas moins pour pouvoir exprimer toute sa toreria et laisser libre cours à son inspiration. Entame arodillada puis poursuite de grande musique sur les deux rives. A la conclusion d’une intense série droitière, une arrucina fit se lever les travées. Talavante, face à la noblesse XXL du Victoriano s’en donna à cœur joie, tout comme le public pescalune qui alla jusqu’à demander la grâce du brave. Le palco a tenu le choc, à raison, et Talavante vit s’envoler les trophées maxima avec un pinchazo sur le premier voyage. Entière en place d’effet rapide. Deux oreilles incontestables et vuelta al ruedo pour « Armero ».

Daniel Luque, pour sa présentation sur les bords du Vidourle est apparu d’emblée avec l’envie d’y accrocher un succès. Ce que l’andalou fit dès sa première sortie. Suave à la cape par véroniques coulées et parones, avant une seule et vilaine pique. Bon quite, par chicuelinas ajustées. Face à un bon toro, noble, avec du fond mais juste de force, Luque se montra techniquement parfait et appliqué usant sans scories d’une muleta à la fois douce et poderosa, notamment sur la rive droite avec plusieurs mouvements très profonds, sur la juste cadence. Moins de fluidité sur la rive opposée où le maestro de Gerena eut à user de plus de domination, dans un ensemble portant sur les travées, conclu par luquecinas maison et un coup de rapière, logé de moitié mais foudroyant. Deux oreilles.

Le sévillan paracheva sa présentation lunelloise triomphale devant l’ultime, le plus complexe et le plus vil sous le fer, toujours en une seule rencontre. Bonnes véroniques pieds joints et la demi de cartel. Malgré une faena plus technique et plus irrégulière en travé, Luque trouva un écho parmi les plus favorables à sa prestation, faite de temple et de domination d’où émana plusieurs séquences de bonne note, notamment sur la diestra. Entière en arrière et atravesada. Oreille, après pétition majoritaire.

FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA

Arènes Francis San Juan, Lunel. Corrida des Fêtes “Monstruo”. No hay billetes. Ciel dégagé. 2 toros de Gallon (1 et 5) 5 Victoriano del Río et un Toros de Cortes (3).

Présidence : Mr Jean Jorge assisté de Messieurs Bruyat et Calvet

Poids des toros : 510, 498, 531, 518, 528, 528, 516 et 507

Cavalerie Heyral.

Daniel Luque effectuait sa présentation aux arènes de Lunel.

Vuelta al ruedo au 7eme toro « Armero » n°19 né en octobre 2019, castaño, de 516 kg

LEA VICENS (chaleco gris) :  salut et salut

SÉBASTIEN CASTELLA (bleu d’Outremer et azabache) : oreille et silence après avis

ALEJANDRO TALAVANTE (bleu cobalt et argent) : oreille et deux oreilles

DANIEL LUQUE (framboise et or) : deux oreilles et oreille après avis

REPORTAGE PHOTO PIERRICK CHARMASSON

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