Pas de vainqueur dans cette deuxième étape de la Feria Pascale 2023, mais chacun a pu rentrer aux stands avec sa faena, toutes de grand mérite et une oreille dans l’esporton, cueillies grâce à trois styles tauromachiques bien distincts, mais toutes amplement méritées aussi ! Il faut dire que la corrida conduite depuis Guadalix de la Sierra par la famille Del Rio n’avait rien d’un cadeau et l’après-midi ne fut jamais une promenade de santé, loin s’en faut.
Six toros donc, deux du fer de Toros de Cortes (1 et 4) globalement bien présentés, disparates d’armures et de gabarit. Lourds et charpentés les 2 et 4, plus modeste et plus noble le 1er, plus harmonieux le 6 qui n’avait n’a jamais accordé ramage à plumage. Le plus complet s’avéra être le quinto “Cangrejera” ovationné à l’arrastre après s’être montré particulièrement brave et encasté. Tous foncèrent avec promptitude vers la cavalerie, hormis l’ultime vite dégonflé. Mal piqués dans l’ensemble à l’exception du premier.
Ambitieux et auréolé d’un triomphe marquant lors de la précédente edition, Daniel Luque a d’emblée placé le curseur très haut avec une faena exquise devant le premier toro de l’envoi. Un toro résultant noble, fait quasiment de toute pièce par l’intelligence torera de l’andalou qui signa une première séquence par naturelles juste remarquable de suavité. A l’aise dans ses zapatillas, l’andalou fit preuve d’une incroyable décontraction, toréant relaché sur les deux mains avec une préférence personnelle pour le tracé savoureux des naturelles. Final époustouflant par luquecinas sans se mouvoir d’un iota avant estocade en place. Mort en brave du noble “Arandino” et oreille ô combien méritée pour le diestro de Gerena.
Son second, haut, lourd et âpre ne permettait rien de mieux qu’une lidia ferme. Avec intelligence et maitrise, le sévillan fit le job fermement face à la mauvaise caste du Cortes, brusque et violent, sans jamais pouvoir trouver l’ouverture. Double pinchazo avant lame plate.
Emilio de Justo hérita en cinquième position de l’animal le plus complet de l’épopée. Un toro charpenté, salué par un bouquet de véroniques soigneusement parsemées avant que le Del Rio ne sème la panique dans les rangs pour un deuxième tiers où il fut mal piqué en deux rencontres durant lesquelles il désarçonna l’equidé et son lancier. Bien banderillé par Morenito d’Arles. Faena d’intensité croissante, puissante et supérieure sur la corne droite d’un toro encasté, brave et prompt face au leurre. Emilio de Justo s’est employé, soumettant l’étoffe avec fermeté sous le museau du quadrupède pour une œuvre d’une grande pureté sur les deux rives, avec liant, rythme et magnitude. Excellent les deux jusqu’au final d’une faena majeure primé d’un trophée seulement, la faute à une mort en deux assauts, mais véritable oreille de poids ! Le premier toro du torero de Caceres s’avéra beaucoup moins complet et davantage brusque. L’extremeño lui appliqua une faena solide et sincère avec beaucoup de voix, majoritairement droitière et bien menée, d’une implication de tous les instants. Pinchazo avant lame entière. Vuelta pour l’homme et applaudissements pour le cornu.
S’il le fallait encore, pour les grincheux par exemple, Juan Leal a prouvé une fois de plus qu’il n’était pas qu’un monument de courage mais que le garçon sait faire de grandes choses avec sa muleta. L’arlésien le démontra devant son premier opposant “Lastimado”, dès les premiers instants d’une faena parfaitement débutée de la droite, Juan Leal liant les séries avec lenteur notamment sur la diestra en baissant la main. Une lourde voltereta vint faire basculer la rencontre dans une autre dimension. L’arlésien accrocha le bicho à sa ceinture pour plusieurs échangés épris d’émotions et d’une grande décision. Faena épique, marquée par l’investissement du garçon jusqu’à l’assaut final pour une lame portée en toute sincérité. Oreille méritée. Le local de l’étape de pu réussir le desquite devant l’ultime, bien fait, mais vide de toutes velléités. Juan Leal composa, sans possibilité de séduire. Engagement cette fois moins évident au moment de conclure et kyrielle de descabellos à la frontière du troisième avis.
FICHE TECHNIQUE DE LA CORRIDA
Arènes d’Arles. Feria de Pâques. 3/4 d’arène. Temps radieux, brise légère. Toros de Victoriano del Rio (2,3,5 et 6) et Toros de Cortes
Organisation : LUDI ARLES ORGANISATION
Présidence : Mr Maragnon assisté de Mme Pages et Mr Boyer
Poids des toros : 510, 570, 545, 575, 530, 515.
Cavalerie Bonijol : 12 rencontres
Salut du banderillero Ivan Garcia au quatrième.
DANIEL LUQUE (blanc et argent soutaché de noir) : oreille après avis et silence après avis
EMILIO DE JUSTO (bleu de France et or) : vuelta après avis et oreille après avis
JUAN LEAL (basilic et or) : oreilles après avis et silence après deux avis.
RESEÑAS DES TOROS
Arandino, n°161 né en juillet 2018 de 510 kilos, colorado de Toros de Cortes. Applaudissements
Soleares, n°7 né en avril 2018 de 570 kilos, negro. Silence
Lastimado, n°108 né en aout 2018 de 545 kilos, castaño. Applaudissements
Ebanista, n°162 né en novembre 2017 de 575 kilos, negro mulato de Toros de Cortes. Silence
Cangrejera, n°53 né en octobre 2018 de 530 kilos, negro chorreado. Applaudissements
Jinetero, n°68 né en février 2019 de 515 kilos, negro. Silence
Merci pour vos photographies, Monsieur Charmasson. Comme toujours “hors du lot”.
Deux d’entre elles en particulier ont fait chavirer mon petit cœur qui bat si fort pour les toros.